L’atelier de Jacques Monneraud se niche au cœur de la forêt du Lazaret, à Anglet (Pyrénées-Atlantiques). Originaire de Pau, le céramiste tourneur officiait encore il y a peu comme directeur de création dans des agences de publicité parisiennes, jusqu’à participer, en 2019, au lancement de l’agence de communication engagée et responsable The Good Company. « J’en suis parti fin 2021, déclare-t-il, car en gagnant des responsabilités, j’ai complètement perdu ce que j’aimais, fabriquer des choses. »
C’est sur Instagram que l’ancien étudiant en Arts appliqués et design graphique rencontre sa nouvelle vocation : « Je suis tombé sur une vidéo du potier anglais Florian Gadsby en train de tourner. J’ai eu un coup de foudre immédiat. Je me suis inscrit à un stage intensif de quatre jours, à raison de huit heures quotidiennes de tournage. C’était très difficile, mais tenir dans les mains ma première pièce m’a procuré une sensation incroyable. »
L’apprenti potier poursuit sa formation professionnelle à l’Atelier chemins de la céramique, à Montreuil (Seine-Saint-Denis). « Le travail au tour n’est pas intuitif, témoigne l’artisan. Tout le corps est engagé, il devient outil, et cela requiert une coordination parfaite. Et puis il y a la terre. Elle est comme vivante, avec son caractère et ses caprices. Avec le tour, dont on contrôle la vitesse, on sent une vibration, c’est comme le pouls d’une personne. Il faut appréhender à la fois la machine et la matière. »
Changement de nom et de lieu de vie
Son CAP de tournage en céramique en poche, l’élève pugnace a associé changement d’activité avec changement de nom et de lieu de vie. Reconnu dans le milieu de la publicité sous le nom de Jacques Denain, il a repris le nom de jeune fille de sa mère peintre, Patricia Monneraud. « Cependant, confie-t-il, la vie d’artiste m’a toujours fait un peu peur, alors j’ai rapidement choisi de faire de l’utilitaire. D’abord des bouteilles d’huile, et beaucoup de recherche de formes sur des théières et des coquetiers. » En bon communicant, il partage avec humour son quotidien d’artisan sur un compte Instagram suivi par quatre-vingt-six mille deux cents followers. Y défilent clichés léchés de ses pièces, vidéos de démonstration, petits films d’animation, dessins précis ou détails bleu électrique comme le bonnet de laine qu’il porte parfois.
Dans le grand lieu lumineux qu’il partage avec les fondateurs de l’enseigne de mobilier et d’objets Little Anana, le trentenaire s’est aménagé un espace fonctionnel et ordonné. Sur l’établi, la vieille lampe de travail de son grand-père maternel, dessinateur de moteurs d’hélicoptère qui possédait un atelier de menuiserie sous les toits de la maison familiale. Ici, le four à céramique ; là, deux tours côte à côte, l’un réservé au tournage, l’autre au tournassage, l’étape des finitions. Sous une desserte reposent des blocs de différentes terres emballés dans des sacs en plastique pour conserver leur taux d’hygrométrie. De grands pots blancs et des bocaux renferment les oxydes colorants et les minéraux destinés à l’émaillage.
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