samedi, mai 18
Dans une maison détruite le 7 octobre par une roquette tirée par les attaquants du Hamas, à Ofakim (Israël). Photo du 8 octobre.

« 07 octobre. La journée la plus meurtrière de l’histoire d’Israël racontée par les victimes et leurs proches », de Lee Yaron, postface de Joshua Cohen, traduit de l’hébreu par Colin Reingewirtz et Laurent Trèves, Grasset, 368 p., 23 €, numérique 16 €.

A l’aube du 7 octobre 2023, Raz, 24 ans, se trouve avec des amis au festival Tribe of Nova, où se sont rassemblés des milliers de raveurs venus d’Israël, mais aussi d’Europe ou du continent américain. Soudain les sirènes retentissent, signalant une attaque de roquettes. Quand sa mère appelle le jeune homme pour le prévenir qu’un attentat est aussi en cours, Raz lui répond qu’elle est folle. Mais, caché sous la scène du festival, il voit bientôt des hommes armés abattre méthodiquement les danseurs qui tentent de fuir. « Un tir. Un cri. Une chute. Un éclat de rire. » Un peu plus tard, il assiste au viol d’une femme par cinq hommes en civil, qui finiront par la poignarder à mort. Dix heures ont passé quand le miraculé peut enfin sortir de sa cachette. Au policier qui lui demande s’il a besoin de quelque chose, Raz répond : « Juste un verre d’eau. Et une feuille et un stylo, si possible. »

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Noter pour ne pas oublier, voilà une urgence qui vient de loin. Comme l’a montré l’historien américain Yosef Hayim Yerushalmi (1932-2009) dans un livre classique, Zakhor. Histoire juive et mémoire juive (La Découverte, 1984), cet impératif mémoriel structure la tradition biblique. « Souviens-toi de ce que t’a fait Amalec », « Souviens-toi des jours d’antan, repassez les années de génération en génération », « Souvenez-vous que vous étiez esclaves en Egypte », martèle le texte, jusqu’à faire coïncider l’injonction du souvenir avec l’espérance de survie. En ont témoigné, au fil des siècles, les « livres du souvenir » que les rescapés de tel ou tel pogrom rédigeaient pour que l’archive préserve l’avenir.

C’est dans cette lignée que s’inscrit 07 octobre, ouvrage qui paraît aujourd’hui et dont « Le Monde des livres » publie de larges extraits. Son autrice, Lee Yaron, est journaliste à Haaretz, quotidien israélien classé à gauche et bête noire du gouvernement Nétanyahou. Agée de 30 ans, elle s’est fait connaître par ses enquêtes sur les affaires de corruption politique et sur la crise climatique, mais aussi sur les questions de discrimination. Ses nombreux articles consacrés aux violences subies par les femmes, les personnes LGBTQ+ ou les demandeurs d’asile lui ont permis de décrire tous les visages de la société israélienne : Juifs, Arabes, Bédouins, Ethiopiens, Soudanais, Chinois…

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